Promesse d’une Afrique toujours dépaysante, Marrakech offre aussi celle d’une douceur sans pareil les mois de nos hivers trop rudes.
Quoi de mieux donc que de commencer cette nouvelle année avec une dérobade tout sud dans une ville qui affiche une constance dans les métamorphoses. Au programme d’abord, des adresses en vue, trois nouveaux hôtels et deux restaurants ainsi qu’une galerie-musée en forme d’écrin. Et pour finir, les enceintes d’un spa dont le temps et les années ne semblent flétrir le plaisir que l’on prend à y retourner. En route pour Marrakech.
3 hôtels
Maison Brummell Majorelle
Il aura donc fallu attendre toutes ces années pour que le quartier de Majorelle de Marrakech voit une adresse hôtelière digne de ce nom, enfin ouvrir ses portes. Il faut dire que le résultat est plutôt séduisant, mêlant le style et les rondeurs des années 50 avec un contemporain très lissé, poussé jusqu’au minimalisme. Imaginé par les architectes Bergendy Cooke et Amine Abouraoui, la marque Brummell détenue par l’hôtelier autrichien Christian Challert, prend ici place aux abords du Musée Yves Saint-Laurent de la ville rouge. Inscrite dans un bloc de béton, la Maison affiche un jeu savant d’ouvertures sculpturales arrondies dont les variations de tailles offrent une expérience visuelle et spatiale aussi délicate que poétique. A l’intérieur, les architectes font la place belle à un minimalisme très élégant grâce à une syntaxe architecturale harmonieuse et maitrisée. Tadelakt mais aussi terrazzo et pièces de céramique artisanales sont autant d’éléments qui ponctuent délicatement cette belle demeure, mouchetée de pièces de cuivre là pour réhausser le ton rustique. Les huit chambres, parfaitement appointées, s’en tiennent au strict minimum du luxe sans jamais surjouer la scène. Une cuisine simple et élégamment exécutée que l’on vient prendre dans les salons sur des tables à partager, vient parfaire la note de cette adresse somptueusement subtile.
Maison Brummell Majorelle, www.maisonbrummellmajorelle.
IZZA Marrakech
Niché au détour d’un dédale de venelles, dans un quartier encore peu emprunté par les touristes, à quelques encablures seulement du célèbre restaurant Dar Yacout, l’hôtel IZZA fait montre d’une bien délicate discrétion. Pourtant bâtie autour de sept maisons, aboutée par trois cours et cinq escaliers qui mènent à un généreux toit-terrasse, l’adresse ne se dévoile comme la vaste demeure d’un artiste d’un autre temps, qu’une fois les portes passées. Un esprit bohème s’empare alors de l’espace, rappelant insidieusement le passage du décorateur Bill Willis qui habita ici, il y a bien longtemps de cela. Un homme amoureux du beau et de la patine de l’ancien, et dont l’appétit pour la contre-culture n’aura jamais cessé de nourrir le génie de son esthétisme orientalo-chic. Si le bar de l’hôtel IZZA porte d’ailleurs son nom, c’est le nom d’autres hommes à l’esprit libre que les 14 chambres et suites arborent : Allen Ginsberg, Pierre Bergé, Brion Gysin… Et bien entendu Yves Saint-Laurent qui lui s’invite dans la plus grande et sublime suite de l’hôtel, que les amoureux du détail et des matières ne manqueront pas de faire leur. Dans un mélange subtil croisé d’ancien et de contemporain, entre pièces de mobilier chinées de très belle facture, tissus d’éditeurs (Lelièvre, Pierre Frey…), gravures d’époques signées ou œuvres photographiques, comme celles de Leila Alaoui dont les portraits XXL sont les dignes sentinelles du petit lobby de l’hôtel, l’on trouve aussi des accrochages de pièces NFTs disséminées sur tous les murs de la propriété. Mouhcine Rahaoui, William Mapan, Michael Zancan, Tyler Hobbs ou Matt Deslauriers sont autant d’artistes dont les œuvres mises à la vente, font de l’adresse une virevolte poétique qui apportent à Izza son caractère unique de galerie-hôtel. Génial et jubilatoire.
Izza Marrakech, www.izza.com
Pure House Marrakech
C’est la nouvelle adresse acidulée du quartier de Mellah de la médina. Un riad au fond d’un dédale de ruelles qui une fois la porte poussée, se montre sous les traits designs et contemporains d’une hacienda 2.0. Niché dans une cour lumineuse, constellé de plantes et cactus, le riad abrite sur deux étages, 11 chambres décorées avec soin dans des tons doux et matériaux naturels, flanquées de photographies de mode ou de dessins d’artistes. Au troisième étage, le toit-terrasse offre une jolie prise de hauteur, permettant de contempler la ville et les cimes du Mont Atlas en lézardant sur des chaises longues ou en dévorant un petit déjeuner sainement ficelé. Car c’est aussi l’un des points forts de ce Pure qui au-delà de ces lignes délicieusement minimales, affiche aussi la bonne mine des adresses éco-sympathiques. Une seconde adresse, la Farmhouse Hacienda située à une petite quarantaine de km au sud de Marrakech, pousse d’ailleurs encore plus loin la coquetterie de la reconnexion nature, sur une parcelle de terre qui lui est entièrement consacrée. Une ode contemporaine à la nature, la culture du bien-être et celle de la réflexion pour une expérience très élégante, très Pure.
Pure House Marrakech, www.purehousemarrakech.com
2 restaurants
La Grande Brasserie d’Hélène Darroze au Royal Mansour
Après le remarquable passage de Yannick Alléno, c’est donc à la cheffe au six étoiles Hélène Darroze de reprendre les commandes des cuisines du sublime Royal Mansour. Pour son opus marocain, la cheffe se sera d’abord inspirée de ce lieu fastueux qu’est le Royal Mansour, mais aussi et surtout, des terres du Maroc riches en denrées fines et savoureuses. Poissons des côtes atlantiques, de Dakhla à Safi, agneau des terres de l’atlas, et aromates, verveine et romarin, menthe, pensées, fenouil, thym et basilic, du jardin de l’hôtel, font le délice de cette table généreuse et sans concession, imaginée par Hélène Darroze. Goûtez les fougères au lait de brebis pour une envolée au cœur des plaines de l’Atlas. Piochez dans le guacamole, servi dans son mortier, pour saisir l’ampleur de la chose et le vent des parfums vous empoigner délicatement les papilles. Saisissez-vous du riz acquarello noir et ses calamars sautés au chorizo de canard avec pommes allumettes pour un croquant de saveurs. Pour les plus sages, le plateau des fromages pour lequel quelques pépites régionales de chèvre ont été débusquées. Un affolant chariot de desserts ayant toujours raison de la vaine coquetterie, épargnez-vous la minauderie avec une poire à la flamme et son sablé à l’huile d’olive, lait d’amande et marjolaine, qui file comme un glaçon sur une roche tiède. La carte des vins fait aujourd’hui la part belle à la France mais une méticuleuse sélection de vins marocains permet de prolonger l’expérience chérifienne avec un véritable panache. Délectable.
Royal Mansour, www.royalmansour.com
Pétanque Social Club
On y venait alors pour pointer ou tirer en sirotant quelques verres… Cette adresse des années 30 aura de fait inspiré le nouveau propriétaire des lieux, Kamal Laftimi, qui l’a entièrement réimaginé pour en faire le Pétanque Social Club, l’une des adresses les plus en vogue aujourd’hui à Marrakech. L’on y pénètre par une porte sans nom qui s’ouvre sur une vaste cour aux allures d’un dimanche en goguette. Les ficus caoutchouc géants en sus. A l’intérieur, les salles sont signées par les décorateurs d’intérieur Diego Alonso et Alexeja Pozzoni qui ont mis là ce qu’il fallait de folie superlative, meubles chinés, accrochages en tous genres et objets de toutes les époques, pour créer un lieu entre magie chic et mémoire festive. Comme un enchaînement de scènes de film, l’on passe d’une salle à l’autre en changeant de décor, sans jamais perdre toutefois le sublime. Les cartes du bar et du restaurant sont sainement fournies, avec d’une part, une liste de cocktails plutôt léchée, et d’autre part, un menu – entre grignote et plats plus élaborés – qui tente et gagne en surprenante créativité : brocoli grillé au chutney de choux blanc avec sa sauce miso ou encore poulet sauce yaourt et chou rouge mariné. Un lieu ouvert de 8h du matin à 1h. Et jusqu’à 2h du jeudi au dimanche.
PSC, 74 bd El Mansour Eddahbi Guéliz Marrakech. Réservation obligatoire via WhatsApp + 212 (0)6 66 45 53 80
Le MAP
Nouvelle addition culturelle de Marrakech, le MAP – Monde des Arts et de la Parure – a ouvert ses portes sur une collection privée de plus de trois mille pièces de bijoux et autres objets de parure, soigneusement sélectionnés parmi une collection de plus de 7000 pièces rassemblées par Marlène et Paolo Ponce-Gallone durant leurs nombreux voyages. Elles sont dorénavant exposées au cœur d’un très beau bâtiment entièrement réimaginé par le duo d’architectes franco-libanais Michel Charrière et Joseph Achkar, à qui l’on doit, entre autres, la rénovation de l’Hôtel de la Marine sur la place de la Concorde, à Paris. Durant cinq années qu’ont duré les travaux, les architectes ont usé de tous les corps de métiers de l’artisanat pour confectionner, autour d’un puits de lumière, un écrin de trois niveaux qui couvrent près de 1400m2. Des éléments traditionnels, comme la terre cuite et les poutres de cèdre, se frottent aux lignes contemporaines de l’escalier de béton, au sein desquels se loge une technologie discrète assurant au cheminement toute son aisance mais aussi sa beauté. Conçu autour de vingt-deux étapes, le parcours invite à la déambulation, entre symbolisme et histoire mais aussi techniques et usages dans des sociétés traditionnelles qui nous font naviguer de l’Afrique jusqu’en Asie en passant par le Moyen-Orient. A noter, un toit-terrasse en forme de jardin des simples avec une table pour y déguster des petits plats rondement menés (le directeur des lieux est un fin connaisseur de la chose gourmette) à prix abordables. Deux perles en une.
Le MAP, www.lemapmarrakech.com
1 spa
La Maison arabe Bien-être & Spa
Seule adresse héritage de cette liste, La Maison Arabe comme le garant d’un luxe aux valeurs immuables. D’abord restaurant de renom, qui depuis 1946 accueillait tout ce que le monde politique et artistique de l’après-guerre comptait d’important, la Maison Arabe réapparait sur le devant de la scène en 1998 sous sa forme actuelle de boutique-hôtel. Et par ailleurs premier du genre dans la médina. Armé d’un vaste espace spa & bien-être, l’on y vient pour l’immersion dans un luxe discret auquel La Maison Arabe n’a jamais dérogé. Décorée dans un style mauresque somptueux, c’est d’abord l’atmosphère de l’adresse qui transporte, une authenticité modernisée qui justifie à elle seule un passage dans cette enceinte. Sans flafla ni surplus, l’on plonge dans le vaste menu des soins que le lieu affiche : hammam à la fleur d’oranger, gommage au sel marin au géranium, soin du visage au ghassoul aromatisé aux sept plantes et des séquences de massages entre l’immanquable « massage du souk » pour les pieds, et l’ineffable Beldi pour une session gommage-soin des cheveux, dans la délicate intensité de techniques ancestrales. Parce que la qualité n’est pas une mode.
La Maison arabe Bien-être & Spa, www.cenizaro.com/lamaisonarabe/marrakech