Étude sur le tourisme de mémoire et les effets du changement climatique : une nouvelle perspective pour les plages du débarquement de Normandie
L’étude D-Day climate change, réalisée de 2021 à 2024, soutenue par Fondation de France dans le cadre du programme « Les futurs des mondes du littoral et de la mer », a été réalisée par une équipe interuniversitaire des universités de Caen, Le Mans, Nantes et Nîmes, incluant les laboratoires ESO, Histémé (université de Caen Normandie), LETG, IDEES et Chrome.
Elle révèle les dynamiques du tourisme et l’aménagement des milieux littoraux des plages du Débarquement de Normandie, face aux défis du changement climatique. L’équipe pluridisciplinaire a collecté les données via des ateliers participatifs, des entretiens individuels et des questionnaires. Ces enquêtes ont été conduites en incluant la participation de répondants à la fois locaux, normands, français et internationaux, afin de prendre en compte les perceptions citoyennes, communes et différenciées, en fonction des origines géographiques. Les résultats mettent en évidence les perspectives d’adaptation des aménagements et pratiques touristiques face aux impacts climatiques et les demandes citoyennes de continuation des parcours mémoriels le long des Plages du Débarquement.
Les objectifs de l’étude
L’étude intitulée « D Day Climate Change : Tourisme de Mémoire face aux Effets du Changement Climatique » s’inscrit dans le cadre du programme « anticiper et s’adapter aux conséquences du changement climatique », avec un focus sur les sites littoraux de mémoire du Débarquement de 1944, dont Utah Beach, la Pointe du Hoc, Omaha Beach, la batterie de Longues-sur-Mer, le port d’Arromanches, Juno Beach, Bernières-sur-Mer, et Sword Beach. L’objectif est d’évaluer l’exposition des lieux de mémoire littoraux aux risques littoraux, et de diagnostiquer les demandes citoyennes du futur des lieux de mémoire face à l’évolution du littoral, pour informer les décideurs en matière d’aménagement, de gestion et de valorisation des sites et du territoire.
Les résultats Clés
Les résultats de l’étude montrent que les usagers ont différentes perceptions face aux changements climatiques et à leur impact sur les sites de mémoire. Les habitants de chaque secteur historique des Plages du Débarquement connaissent et expriment un attachement surtout à leur propre secteur et projettent un avenir de la côte à partir de leurs perceptions vécues des changements, comme le début de l’élévation du niveau de la mer.
Les autres habitants de la région Normandie peuvent avoir une représentation plus catastrophiste de l’avenir du littoral, notamment l’inondation des terres basses, ce qui minore la préoccupation pour les lieux de mémoire. Les autres visiteurs français portent leur attention sur la préservation du trait de côte, permettant d’y associer un intérêt pour les biens mémoriels.
Les répondants étrangers ont une préoccupation plus ciblée pour les biens mémoriels et le souci de leur continuation, ce qui les amène à penser aussi à d’autres risques que ceux venant de la mer (pluies, pollutions atmosphériques). Enfin, certains étrangers, notamment américains, expriment une demande de préservation du paysage littoral, vu depuis la mer, sur les secteurs du Débarquement, pour conserver l’image paysagère et patrimoniale.
Les jeunes générations, quant à elles, rejettent majoritairement l’idée de ne plus établir de nouveaux sites de mémoire et expriment autant que les plus âgées une demande de visites de mémoire sur place, montrant une forte volonté de préserver et de continuer à commémorer ces lieux.
Évaluation des risques météo-marins : L’étude souligne l’exposition des sites de mémoire aux risques d’érosion, de submersion et de mouvements de falaise. Par exemple, la Pointe du Hoc et le port d’Arromanches présentent une forte exposition aux dynamiques de la mer. D’autres secteurs, endigués ou bénéficiant d’un espace dunaire protégé, sont pour l’instant stables. Enfin, certains sites littoraux en côte basse, notamment Juno Beach, connaissent un ensablement.
Adaptations des aménagements : Les scénarios proposés pour l’avenir montrent une diversité de perspectives allant du maintien des structures actuelles à la délocalisation de certains biens mémoriels. Les participants aux ateliers ont souvent exprimé des idées de renaturation et de déplacements des biens mémoriels. A l’horizon 2044, une majorité de scénarios propose de maintenir les structures actuelles avec des adaptations mineures, telles que la renaturation des dunes et la protection des digues existantes. Tandis qu’à l’horizon 2100, les scénarios sont plus variés et incluent des déplacements significatifs de biens mémoriels vers des zones intérieures pour faire face à l’érosion et éviter les risques de submersion.
Lien aux politiques publiques : Les résultats de l’étude fournissent des outils d’aide à la décision pour les acteurs de l’aménagement et de la valorisation des sites. Les propositions citoyennes de scénarios d’avenir, qui sont parfois en retard ou en avance avec les politiques actuelles en matière d’adaptation du littoral, enrichissent le dialogue entre les chercheurs et les décideurs publics.
Partenariats et Collaboration
L’étude a fait l’objet d’un suivi par les acteurs du tourisme de mémoire et de l’aménagement du littoral des Plages du Débarquement : collectivités locales, syndicats mixtes, offices de tourisme, musées, Conservatoire du littoral, avec une réunion par semestre, afin de pouvoir échanger sur les relations à optimiser entre le programme de recherche et les attentes des acteurs.
Les résultats mis en exposition
L’exposition interactive « D-Day Climate Change », ouverte au public jusqu’au 5 septembre 2024 au Campus 1, met en lumière les résultats de cette recherche participative. Cette exposition vise à sensibiliser un public large sur les enjeux climatiques et mémoriels des plages du Débarquement.