Expérience en direct à bord d’un vol SAS de Bodö à Oslo : le pilote l’assure, cela ne prendra que quelques minutes. Et nous voici à rouler au ralenti, une errance aéroportuaire, en quelque sorte, pour finir enfin à l’écart, sur la « plate-forme de dégel ». Déjà, deux ou trois avions se font shampouiner dans la nuit polaire. C’est bientôt notre tour. Deux chariots avec une tourelle hydraulique munie d’une lance nous barbouillent. Le temps de quelques photos. Mais sur le hublot, une dégoulinure de mousse rosâtre m’exile du spectacle.
« De-icing » dit-on en anglais… L’opération est indispensable, non seulement pour dégeler les commandes, mais aussi parce que la glace change la forme et la densité de l’aile, réduisant la portance et rendant hasardeux le décollage. Pour contrer cela, la mousse est chaude. Jusqu’à 65°. Pour empêcher qu’elle ne regèle, le mélange comporte une bonne dose de glycol – de l’antigel, si vous préférez. Le colorant rose permet de s’assurer qu’aucune partie n’est oubliée. Encore quelques minutes et l’avion chauffe ses moteurs, expulsant les jets de mousse parasite comme on crache au sortir de l’eau. Il lâche les freins : nous roulons de nouveau, jusqu’à la piste, puis volons dans le sombre ciel nordique, tandis que les dernières traces de produit sont emportées par la vitesse.
Dominique de La Tour