Loin des bazars et des rues bondées d’Istanbul peu propices à une véritable distanciation sociale, une croisière au grand air sur les rives enchanteresses du Bosphore constitue l’un des souvenirs les plus inoubliables d’un séjour dans la mégalopole ottomane.
« Toutes les beautés du Bosphore sont cachées dans les détails » explique sur son site la compagnie de croisière turque Den Den Yachts. Toute l’année, elle organise des croisières d’exception sur le détroit qui borde la cité plurimillénaire d’Istanbul et qui marque la limite méridionale entre les continents européen et asiatique. Car l’ancienne Byzance des Grecs et la Constantinople des Romains n’est pas une ville qui laisse indifférent. Depuis toujours elle envoute ses visiteurs, avec sa lumière méditerranéenne diaphane, ses appels réguliers à la prière, ses subtiles saveurs orientales, ses odeurs de marché aux épices et son architecture monumentale incomparable. Et quoi de mieux qu’une croisière en bateau pour l’apprivoiser, au rythme lent du ressac de la mer, le visage doucement caressé par la brise marine, loin du tohu-bohu de sa circulation anarchique ? La plupart du temps, les compagnies privées proposent un tour d’une heure et demie à deux heures qui permet d’aller jusqu’au second pont Fatih Sultan Mehmet et de faire demi-tour afin de profiter de la vue magnifique sur les deux rives européenne et asiatique. De la plus courte à la moins onéreuse au départ de la gare maritime d’Eminönü, sans commentaire, mal assis et dans la promiscuité, à la location d’un yacht ou d’un voilier de luxe pour une croisière privative diurne ou nocturne avec repas gastronomique et mélopées orientales, il y en a pour toutes les bourses, les envies et les rêves pour un séjour à Istanbul…
La démesure du palais de Dolmabahçe
Le détroit du Bosphore, qui sépare la ville en deux et relie la mer Noire à la mer de Marmara est l’un des symboles d’Istanbul. Trois grands ponts suspendus l’embrassent passionnément et un flot incessant de bateaux le traverse. C’est un détroit unique au monde, long de 32 km pour une largeur de 698 à 3000 mètres qui marque avec les Dardanelles, la frontière entre les deux continents. En laissant derrière soi la pointe du Sérail qui abrite le palais de Topkapı et les orgueilleux minarets de Sainte-Sophie et de la Mosquée Bleue, le navire remonte lentement le détroit pour aborder le somptueux palais de Dolmabahçe. Sur le côté européen du Bosphore, il a été la résidence de six sultans de 1853 à 1922, jusqu’à l’abolition du califat et l’avènement de Mustafa Kemal Atatürk en tant que président de la République turque. Son édification coûta cinq millions de livres-or ottomanes, soit l’équivalent de 35 tonnes d’or, dont quatorze tonnes furent utilisées sous forme de feuille d’or pour décorer les plafonds du palais. D’inspiration, néoclassique, baroque, rococo et bien sûr ottomane, le palais de Dolmabahçe est aussi celui de la démesure. D’une superficie de 45 000 m², il comporte 285 pièces, 44 salles, 6 hammams et 68 cabinets de toilette. Dernière demeure d’Atatürk, le père des Turcs et de la patrie, il y mourut le 10 novembre 1938 à 9h05. Sa chambre et son lit de mort sont d’ailleurs encore visibles et se visitent.
Marbre blanc au palais Çırağan
Un peu plus loin en remontant toujours le Bosphore entre les quartiers de Beşiktaş et Ortaköy, le palais Çırağan est un ancien palais ottoman de marbre blanc orné de colonnes de porphyre réaménagé en hôtel de luxe. Il appartient actuellement à la chaîne Kempinski. Reconnaissable à son interminable façade de style néoclassique qui se mire avec élégance dans les flots scintillants et tumultueux de la mer d’Istanbul, ce palais fut construit pour le sultan Abdül Aziz par les architectes Nigoğayos, Sarkis et Hagop Balyan qui achevèrent l’édifice en 1867. A cette époque, les sultans qui pour certains possédaient encore comme Abdül Aziz des harems, faisaient bâtir leur propre palais moderne plutôt que d’utiliser ceux de leurs ancêtres. Plus tard, le palais devint le parlement de la République des Jeunes-Turcs qui était au début du 20e siècle un parti politique nationaliste, moderniste et réformateur ottoman. L’incendie du bâtiment en 1910, dû paraît-il à un court-circuit n’épargne que ses murs. Envahi par la végétation, il faudra attendre 1986 pour qu’il soit transformé en palace.
Délicieux quartier d’Ortaköy
Village dans la ville, le quartier d’Ortaköy littéralement « le village du milieu du détroit » en turc est devenu ces dernières années avec ses nombreuses échoppes un important centre artisanal. Il constitue également par lui-même une véritable attraction pour les touristes qui viennent s’attabler dès la belle saison aux terrasses des restaurants de poissons appelés « meyhane », mais aussi à celles des petites gargotes pour savourer les mezzes, dolmas, boreks, kebabs, mantis et autres spécialités de la gastronomie turque. C’est ici, à l’ombre de la mosquée d’Ortaköy que les pêcheurs du dimanche viennent taquiner la daurade (karaköz). Réalisée dans un style néobaroque entre 1854 et 1855, la Grande mosquée Mecidiye, son nom officiel, respecte un plan carré et comporte deux minarets. Son aspect général s’inspire notamment de l’opéra Garnier à Paris où l’architecte Nigoğayos Balyan (encore lui) avait fait ses études. Juste après Ortaköy, les ferries se croisent avec nonchalance sous le pont du Bosphore (Boğaziçi Köprüsü) rebaptisé depuis 2016 le pont des Martyrs du 15-Juillet, en référence au coup d’Etat manqué contre l’actuel président Recep Tayyip Erdogan. Inauguré en 1973, il s’élance gracieusement depuis l’Europe jusqu’au village de Beylerbey qui abrite le magnifique palais éponyme sur la rive asiatique. Sa portée principale de 1 074 mètres a longtemps fait de lui l’un des plus grands ponts suspendus du monde. Il est aujourd’hui largement distancé par les deux autres ouvrages qui enjambent hardiment le Bosphore, Fatih Sultan Mehmet (1090 m) et Yavuz Sultan Selim (1408 m), mais aussi par le pont Osmangazi (1550 m) qui franchit le golfe d’Izmit à une cinquantaine de kilomètres au sud d’Istanbul.
Rumeli Hasari, forteresse ottomane
Toujours un peu plus loin, au nord du quartier de Bebek à Istanbul s’élève la fière forteresse Rumeli Hasari. Ultime pièce maitresse de la conquête ottomane, elle a été spécialement imaginée par le sultan Mehmed II (1432-1481) entre 1451 et 1452, juste avant la chute de Constantinople en 1453, pour empêcher tout renfort venant de la mer Noire, en particulier des colonies génoises. La construction de cette place forte prit moins de quatre mois, grâce aux 3000 ouvriers et maîtres d’œuvre qui y travaillèrent d’arrache-pied jours et nuits. À cet endroit, une fortification romaine avait déjà été bâtie par le passé, utilisée comme prison par les Byzantins et les Génois et plus tard remplacée par un monastère. Entre la fin du 19e siècle et le début du 20e des maisons de bois furent installées à l’intérieur de l’enceinte du château en ruines. Elles ont définitivement disparu lors de la remise en état de l’édifice en 1953. De nos jours le lieu accueille des cohortes de touristes amoureux des vieilles pierres, mais aussi de nombreux concerts dans le cadre du festival de jazz annuel d’Istanbul. La forteresse Rumeli Hasari est située stratégiquement au point le plus étroit du Bosphore qui mesure à cet endroit précis 660 mètres. Elle fait face à Anadolu Hisari, un autre château-fort ottoman, bâti quelques dizaines d’années auparavant par le sultan Bayezid Ier, pour barrer définitivement la route aux Byzantins. Rumeli Kavağı est enfin vers le Nord et l’embouchure de la mer Noire le dernier arrêt sur la côte européenne. Ce village de pêcheurs aux petites maisons colorées et longilignes qui s’accrochent aux contreforts de la colline verdoyante est resté très authentique. C’est à cet endroit que la plupart des ferries traversent le détroit pour rejoindre le village d’Anadolu Kavağı, le dernier débarcadère de la côte asiatique.
Le yali, une maison en bois sur le Bosphore
Plus on remonte sur le Bosphore, plus on se délecte à l’approche des « yali » (prononcez yaleu), ces luxueuses villas qui bordent des deux côtés de la rive le détroit. Les yali doivent leur nom à leur situation au bord de l’eau. Yali provient en effet du grec yialos qui signifie « rivage marin ». A l’origine, ils étaient tous peints en rouge et c’est à partir du 18e siècle qu’ils adoptent des tons pastel. Au départ, la modestie de leur apparence extérieure s’opposait à la richesse de leur intérieur où il n’était pas rare d’entendre le doux cliquetis de l’eau des fontaines au milieu des salons et où la pièce noble, le sofa, percée d’innombrables fenêtres, laissait passer abondamment la lumière. Autrefois réservées à l’élite ottomane et aux riches étrangers travaillant à Constantinople, ces demeurent en bois emblématiques du front de mer, se négocient actuellement pour les plus somptueuses entre 4 et 83 millions d’euros. Au-delà du symbole et de la beauté des lieux, l’achat d’un yali offre aux propriétaires étrangers (essentiellement aujourd’hui des acquéreurs originaires des pays du Golfe) la possibilité d’obtenir un passeport turc, ce qui donne automatiquement accès sans visa à de nombreuses destinations dans le monde. Sur les 600 bâtisses en bois dont une soixantaine sont régulièrement mises à la vente, 360 ont une valeur historique. Petits paradis et symboles de l’art de vivre « alla turca », la législation du pays requiert que les bâtiments historiques soient rénovés ou restaurés dans le respect du style original. Dernièrement, les yali ont également gagné en notoriété, grâce au succès des séries télévisées turques largement diffusées dans l’ensemble du monde oriental et arabe et qui se déroulent dans ses magnifiques résidences au bord de l’eau. Des tour-opérateurs proposent même aux touristes de se rendre en pèlerinage sur les lieux où les différents épisodes ont été tournés.
La Corne d’Or de Pierre Loti
Paradoxalement moins connue des touristes, une croisière sur la Corne d’Or vous emmènera immanquablement sur les pas de l’écrivain rochefortais Pierre Loti. En 1879, il écrivit dans la contemplation de ce bras de mer homérique et délicat son premier roman à succès « Aziyadé », une histoire d’amour aux accents autobiographiques entre un officier de marine européen et une jeune femme du harem. Cet estuaire à l’histoire mouvementée est un port naturel. Il fut aménagé dès l’origine par les colons grecs pour former l’embryon de la cité antique. Sous l’empire byzantin, les chantiers navals y étaient installés et un mur d’enceinte le long de la berge protégeait la ville des attaques navales. À l’entrée de la corne, il y avait une grande chaîne tirée en face de Constantinople jusqu’à l’ancienne tour de Galata qui est toujours visible sur le côté nord et empêchait les navires indésirables de passer. Elle fut d’ailleurs contournée par les envahisseurs Ottomans lors de la prise de Constantinople en 1453. En remontant l’estuaire, vers le quartier d’Eyüp, le cimetière ottoman et sa mosquée, le café Pierre Loti offre aux visiteurs sur les hauteurs de la rive européenne de « Stamboul », une vue panoramique et exceptionnelle sur la Corne d’Or. Une légende tenace voudrait que les derniers Byzantins aient décidé avant l’entrée des troupes turques dans la ville de charger le trésor de Constantinople sur un bateau. Ils l’auraient ensuite volontairement coulé quelque part au beau milieu de la Corne d’Or. Aujourd’hui encore, de nombreux observateurs affirment, qu’aux dernières lueurs de la journée, on aperçoit des reflets dorés sur l’onde…
Pour en savoir plus et préparer son voyage :
https://www.goistanbulturkiye.com
https://www.goturkey.com
https://turquietourisme.ktb.gov.tr
Pour le transport
Turkish Airlines : www.turkishairlines.com
Où dormir ?
Sheraton Istanbul City Center
Adresse : Hacıahmet, Kurtuluş Deresi Cd. No:23, 34440 Beyoğlu/İstanbul, Turquie
Téléphone : +90 212 806 10 10
Site : https://www.marriott.com/hotels/travel/istsd-sheraton-istanbul-city-center
Den Den Marine : des croisières de luxe et sur-mesure sur le Bosphore
https://www.kiraliktekneler.com
Adresse : Cihannuma Mahallesi, Gökman Apt. No:67 Barbaros Bulvarı Beşiktaş / İstanbul
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