Lors de la Première Guerre mondiale, alors que la bataille de Verdun et la première bataille de la Marne ont marqué l’histoire, celle du Hartmannswillerkopf a été toute aussi importante et significative.
Situé dans le Massif des Vosges en Alsace, le Hartmannswillerkopf fût un lieu capital de la première guerre mondiale, portant le dur surnom de « montagne mangeuse d’homme », il vît plus de 30 000 soldats périr. Aujourd’hui c’est un lieu de recueillement et de souvenirs grâce au monument national, et au récent Historial franco-allemand de la grande guerre du Hartmannswillerkopf.
Un projet de longue date
Cela fait maintenant trois ans que la première pierre de l’Historial fût posée lors de la commémoration du centenaire de l’entrée en guerre de la France et de l’Allemagne. Dernière œuvre du cycle du centenaire, l’Historial franco-allemand s’immisce magnifiquement dans la nature et la forêt, et se fond entre le paysage et le monument national grâce à sa forme rappelant celle d’une feuille, et sa façade faite de béton matricé évoquant le bois.
Au cours de nombreuses heures de travail, les architectes et historiens ont cherché à faire en sorte que l’Historial s’ouvre à tous types de public. Ils ont réussi à créer un lieu de sérénité « pour tous » pensé d’abord comme une maison qu’un musée. Ainsi, cyclistes, motards et randonneurs peuvent s’arrêter faire une halte et découvrir simplement ce qu’est la bataille du Hartmannswillerkopf.
Mais la tâche n’a pas été simple pour les historiens, car ils ont eu le devoir d’implanter cet événement dans l’histoire de la grande guerre.
Plusieurs parties articulées autour d’un élément central
L’Historial se distingue en quatre espaces retraçant pas à pas la bataille :
Dans l’optique de se rafraîchir la mémoire, un film d’introduction à la première guerre mondiale est présenté dans l’auditorium rappelant les grands faits qui l’ont engendrée et introduit les événements du Hartmannswillerkopf. En plus de cette partie vidéo, des éclairages plus précis sont apportés au moyen d’une grande cartographie qui reprend l’ensemble des lieux de combat à travers le monde.
La deuxième partie se concentre essentiellement sur l’expérience des soldats, avec leur adaptation à la guerre en montagne et les solutions apportées vis à vis de celle-ci, comme la construction de téléphériques à partir de 1915 pour transporter du matériel de construction et les hommes blessés au combat. Un moyen qui sera ensuite adopté par les troupes françaises en 1916.
On y apprend que la guerre en montagne était au désavantage des Allemands car ils n’étaient pas préparés à se battre dans ces conditions, contrairement au Français qui avaient mis en service des chasseurs alpins nommés bataillon de montagne.
Le cœur de l’exposition se trouve dans « le tambour », sorte d’œil central du bâtiment. Il est entouré d’une tranchée archivant des restes de la guerres (armes, mortier, obus, ossements d’animaux, photos), et proposant une lecture archéologique du champ de bataille, en amont avec les recherches historiques.
À l’intérieur du tambour, un film est projeté en vision panoramique. Il retrace les deux premières années de la bataille du Hartmannswillerkopf au travers du témoignage d’un soldat français et d’un soldat allemand. Une carte dynamique en relief évolue en parallèle du court-métrage, elle permet de visualiser en détails les lignes de front et leur constante évolution. Car oui, la position a de nombreuses fois changé de camp, à coup d’obus et de batailles en tranchées. Le film permet de s’immerger véritablement dans l’expérience des soldats grâce à une approche plus personnelle, comme lorsque le soldat français raconte sa frayeur vis-à-vis des lances-flammes allemands qu’il affronte pour la première fois. C’est alors durant une quinzaine de minutes que l’on assiste sans voix mais avec émotion à ce désastre, à cette bataille qui se déroule en amont du reste de la guerre.
Le dernier espace est consacré aux mémoires du champ de bataille et de la confrontation franco-allemande. Il apporte un éclairage particulier sur les monuments aux morts, et plus précisément sur la place du monument national au sein du patrimoine local, national et transnational. La question de la mémoire humaine est mise en évidence, avec comme fer de lance la réconciliation franco-allemande.
Durant toute la visite, on ressent constamment l’esprit franco-allemand, car tout est conçu dans cette perspective. Les deux langues sont omniprésentes et un double regard est posé sur chaque événement, sans jamais prendre le parti de l’un ou de l’autre.
Un musée à ciel ouvert
La visite de l’Historial se poursuit en extérieur, dans la montagne du Hartmannswillerkopf. La montée vers le sommet s’effectue par le boyau 0, le point de départ du bataillon français avant de rencontrer les Allemands dans la montagne. C’est en traversant les anciennes tranchées et divers points stratégiques que l’on se rend compte que la nature a repris ses droits, tout en gardant néanmoins des cicatrices du champ de bataille. Les pierres sont marquées par le passé et la taule a rouillé. Par endroit, le sol est encore creusé des explosions d’obus survenues il y a maintenant plus de cent ans.
Plus qu’un lieu de connaissance, l’Historial franco-allemand de la grande guerre du Hartmannswillerkopf est un lieu de partage, de découverte et de réflexion. Accueillant qui veut bien se laisser guider au travers de l’histoire, et de cette bataille trop méconnue et pourtant si décisive.